Cet épisode illustre la méconnaissance totale de la langue espagnole par Peter Hellmich.
À l’occasion du tournage dans le camp de Pisagua, un prisonnier, G. Uberlan Gonzalez, a remis à Miguel Herberg une petite peinture (voir ci-contre) qui représentait un tank et lui a dédicacée :
Uberlan – Pisagua 30-01-74 – Prisioneros de Guerra – A Miguel
Le terme de « prisonnier de guerre » correspondait au statut officiel des prisonniers, un statut sensé justifier les conseils de guerre expéditifs qui ont conduit une vingtaine de prisonniers devant le peloton d’exécution – d’autres ont été assassinés sans même passer par un conseil de guerre. N’importe quel lecteur, même sans parler l’espagnol aura compris que G. Uberlan a donné cette œuvre modeste à Miguel Herberg au nom des « Prisioneros de guerra ».
Ce cadeau reçu, Miguel Herberg, en présence de Peter Hellmich, avait suggéré à G. Uberlan qu’il fasse un autre dessin à l’intention de son caméraman. G. Uberlan a alors apposé une dédicace, semblable à la précédente, sur une autre œuvre – la silhouette d’un militaire casqué et son ombre :
Uberlan – Pisagua 30-01-74 – Prisioneros de Guerra – A Peter
Tout le monde aura compris, même sans parler l’espagnol, qu’alors que la dédicace du premier tableau s’adressait à Miguel, c’est-à-dire à Miguel Herberg, la dédicace du second tableau s’adresse maintenant à Peter, c’est-à-dire à Peter Hellmich.
Tout le monde l’aura compris, sauf « Heynowski & Scheumann . Peter Hellmich », les auteurs de Anflug auf Chacabuco. Walter Heynowski, Gehrard Scheumann et Peter Hellmich ont bien réalisé que l’on parlait de « prisonnier de guerre » (Kriegsgefangenen), mais ont cru que la dédicace était signée par le « Kriegsgefangenen A. Peter », un prisonnier de guerre du nom d’A. Peter (Andres Peter, par exemple).
À ce stade d’incompréhension – être même incapable de repérer son propre prénom dans une dédicace de six mots faite devant lui –, prêter à Peter Hellmich la direction des opérations au Chili – comme l’ont fait Hanns Stein, Pedro Chaskel, Isabel Mardones, Patricio Guzman ou Ricardo Brodsky – ne semble pas très sérieux, ou plutôt atteste de l’immense mauvaise foi des indéfectibles amis chiliens de Walter Heynowski et Gerhard Scheumann.
Textes de Jean-Noël Darde ( jndarde@gmail.com ).